By akademiotoelektronik, 28/01/2023

Rafale : les raisons d'une percée historique dans la péninsule arabique

Le prince héritier Mohammed ben Zayed Al-Nahyane, dit « MBZ », a rempli la hotte de Noël du président de la République Emmanuel Macron au-delà des espérances, à l'occasion de sa visite dans les pays du Golfe qui l'a conduit de Dubaï à Doha au Qatar, puis à Djeddah en Arabie saoudite. La tournée s'est ouverte par l'annonce par les Emirats arabes unis du plus gros contrat jamais remporté par Dassault pour la vente de Rafale, avec l'annonce d'une commande record de 80 avions de chasse dernier cri. Le pays devient ainsi le premier client à l'export du Rafale, devant l'Egypte.

Le ministère des armées a annoncé que le contrat représentait une commande d'environ 14 milliards d'euros. Un montant rarement approché dans l'histoire de l'industrie militaire française, voire dans l'industrie française tout court. Et auquel il faut ajouter la commande pour 2 milliards d'euros d'armements liés à l'avion de chasse auprès de MBDA et de Safran. Enfin, les EAU ont rajouté dans la hotte l'achat pour environ un milliard d'euros de 12 hélicoptères de combat Caracal (H225M) fabriqués par Airbus Helicopters à Marignane.

VIDEO. 5 choses à savoir sur le Rafale

Longues tractations

A Dubaï, le président Macron s'est félicité de cette signature en soulignant qu'il s'agissait du plus gros contrat de l'histoire de l'industrie de défense française. Car les avions de chasse, leur armement, ainsi que les hélicoptères seront bien construits en France et ne sont pas liés comme l'était le contrat des sous-marins de Naval Group à l'Australie à des transferts d'activité dans les pays concernés.

Cet accord historique a été facilité par la longue relation qui unit la France et les Emirats arabes unis, liés par un accord de coopération de défense depuis 1995, explique l'hôte de l'Elysée. « Une relation qui s'est intensifiée ces dernières années dans la lutte contre le terrorisme et les efforts pour stabiliser la région. Tout cela a accéléré des discussions que nous avions depuis parfois longtemps et a permis de conclure cette série d'accords sur le plan militaire », a-t-il expliqué.

Interrogée par « Les Echos », la ministre des Armées, Florence Parly, qui se réjouit des retombées pour l'industrie française , a évoqué un an et demi de négociations intenses pour parvenir à cette commande. La décision des EAU de concrétiser ce méga-contrat montre leur souci de resserrer encore les liens avec la France face un certain désintérêt régional manifesté par les Américains.

Rafale : les raisons d'une percée historique dans la péninsule arabique

Les récentes hésitations de Washington sur la livraison d'avions de chasse F-35 ont aussi pu jouer en faveur du Rafale. « Disons que l'imprévisibilité des Etats-Unis a pu favoriser ce contrat », explique-t-on de source française haut placée. Les Emiratis, qui disposent actuellement de 60 Mirage de Dassault et de 80 chasseurs F-16 de Lockheed Martin, mettent ainsi la France au même niveau que les Etats-Unis.

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L es Emirats arabes unis deviennent ainsi le septième Etat à utiliser l'avion de chasse de Dassault, après l'Inde, l'Egypte, le Qatar, la Grèce, la Croatie et bien sûr, la France . Avec cette commande, les Rafale vendus à l'export dépassent désormais les commandes françaises, avec 242 commandes fermes.

Dassault équipe les Emirats arabes unis depuis quasiment leur création, il y a cinquante ans. L'histoire a commencé par la vente de Mirage 5 et s'est poursuivie dans les années 1980, par la vente de Mirage 2000, qui seront ensuite modernisés au dernier standard Mirage 2.000-9 à la suite de longues négociations. Cette fois-ci encore, le prince héritier Mohammed ben Zayed choisit le nec plus ultra.

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Le prince veut des Rafale F4, soit le futur standard de l'avion actuellement en développement pour l'armée française. MBZ offre à ses pilotes le modèle dont l'armée de l'air tricolore elle-même ne disposera qu'en 2025. « Ce standard F4 est un saut technologique, un saut industriel et un saut stratégique » pour Dassault, Safran, Thales, MBDA et leur aréopage de sous-traitants, clamait en 2019 la ministre des Armées, Florence Parly, lors du lancement de cette nouvelle phase de développement qui devait coûter 1,9 milliard d'euros. Une somme susceptible d'être abaissée, puisqu'une partie des coûts de développement pourront être amortis par la commande émiratie.

Les livraisons des 80 appareils s'étaleront de 2027 à 2031. Ce qui garantit un plan de charge important pour le constructeur aéronautique français jusqu'à cet horizon. Actuellement, Dassault Aviation assemble un Rafale par mois, soit une cadence de production proche du minimum requis par contrat entre Dassault et l'Etat français pour maintenir la chaîne de production - qui est de 11 Rafale par an. Au ministère des Armées, on assure que cette commande monstre des Emirats nécessitera une montée en cadence de production de Rafale à deux ou trois unités par mois. Une excellente nouvelle pour l'industrie aéronautique tricolore, qui souffre actuellement de la crise du transport aérien.

On estime que la production d'un Rafale, composé de quelque 300.000 pièces produites à 90 % en France, fournit du travail à 7.000 personnes en France sur environ deux ans. Quelque 400 entreprises françaises contribuent plus ou moins à la fabrication du Rafale et à son armement. Cela va des poids lourds du secteur, comme Safran, qui fabrique les moteurs et l'optronique, ou Thales, qui livre les principaux équipements électroniques, à des PME familiales comme Ametra ou Realmeca, qui produisent quelques pièces très spécifiques de l'avion de combat.

Ventes en série

En ce moment, le groupe achève la livraison à l'Inde et au Qatar de 36 avions de chasse. Il s'apprête aussi à livrer en Egypte un deuxième lot de 30 avions après les 24 commandés en 2015 . Dassault devra aussi livrer six avions neufs à la Grèce. Après une interruption de trois ans, il souhaite reprendre ses livraisons à la France. Cette dernière a commandé 192 avions et s'est fixée pour but de détenir à l'horizon 2025, 210 appareils. Avec 60 Mirage, encore en état de voler au moins une décennie, leurs F-16 et à terme, les 80 Rafale, les Emirats arabes unis pourraient être quasiment mieux lotis que la France lors de la prochaine décennie !

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